Par Alexandre Honiat
» Aujourd’hui, c’est le mardi 5 août 2019, il fait beau et c’est le début de l’expé. Réveil à 7h30 et petit déjeuner aux tartines avec du miel et du thé. Crazy Guy Cave est l’objectif du jour. Cette grotte n’a pu pu être entièrement explorée lors de l’expé de 2016, il fallait donc continuer l’exploration.
L’équipe de 5 était composée de 3 français (Ludo, Hugo et Alex) et 2 turcs. Rassemblement du matériel, perfo, cordes, amarrages, coinceurs, kits et direction la montagne juste en face du camp !
Après 1 200 m de dénivelé et un turc qui fatigue, le trou n’est pas là. Il aura finalement fallut 2h30 pour enfin retrouver l’entrée. Celle-ci est en bord de névé. Je me mets à l’équipement… Dans l’excitation de la découverte, j’équipe un peu mal mais vite. Je fais confiance à mes partenaires pour parfaire tout ça. Après un enchaînement de 3 petits puits et une étroiture verticale, j’arrive au niveau d’un palier. Plutôt une margelle. Le névé continue en direction d’un puits côté droit. Une des suites entrevues par l’expé précédente ? Un tour d’horizon plus attentif me permet d’identifier un petit méandre légèrement en hauteur… Il est hors glace et c’est bien pratique d’évoluer au sec. Je tire donc une vire pour aller voir ça de plus près. Je me retrouve en haut d’un nouveau puits de 8-10 m. Disons qu’il fait 9 m. 2 mètres de diamètre, circulaire, pas mal de béquets rocheux.
Ça aurait été cool de s’en servir comme AN, mais bon, y’a rien qui tient. J’avertis mon ami turc qu’il y a un puits et que je commence l’équipement. Je dégaine mon perfo pour planter un point. J’arrive à trouver un AN solide et j’entame ma descente aux enfers.
Arrivé au sol, pas le temps de me poser, je regarde tout autour de moi les yeux plein d’espoir d’une suite. Je tourne la tête et j’aperçois un passage menant certainement à une salle. Ce passage était bizarre… Je vois 2 billes lumineuses, assez écartées… Comme un chat dans la nuit…
Au lieu d’un chat, c’est un ours qui se présente. Il est grand, il est gros, il n’est pas content, il grogne. Je sais pas trop quoi faire. Je me suis dit c’était la fin pour moi. Mon seul réflexe : reculer le plus possible et hurler le plus fort possible. Je découvre alors une puissance vocale impressionnante bien que peu mélodieuse et il faut le dire, très peu utile. Par contre, mon éclairage étant en position maximale et l’ours ayant ses yeux habitués au noir, il se retrouve complètement ébloui. Il s’avance quand même vers moi, cette fois ci en criant. Un dernier réflexe de ma part avant de quitter ce monde : décrocher une droite de l’espace dans le museau du plantigrade (Je me suis décroché l’épaule sous le choc). Surpris, l’ours a eu peur de tomber sur plus fort que lui et a commencé à s’enfuir. Il escalade le puits que je viens de descendre… Le puits avec les béquets… Oui oui, les béquets qui ne tiennent pas… J’avais raison de pas mettre d’AN dessus… Parce qu’ils ont cassé sous le poids de l’ours et , la gravité étant contre moi, l’ours m’est tombé dessus. Et bim, les chevilles en vrac, un genou plié, et les jambes trouées. L’ours repart aussi sec et escalade le puits à nouveau. Cette fois ci, il réussi a à grimper et mon ami turc, qui ne comprenait absolument pas pourquoi il y avait un tel raffut en bas, a vu un ours émerger du puits où j’étais. Je l’entends hurler à son tour. L’ours ne fait que s’enfuir et part dans le premier départ identifié, celui plongeant plus bas au niveau du névé. Le turc me demande si je suis vivant. La réponse est oui. J’abandonne tout le matos et je remonte au plus vite. Je ne me souviens pas de comment j’ai fait…l’adrénaline »